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Mémoires topographiques

Prendre, obstinément, patiemment, avec soin,  l'Empreinte du Monde comme pour défier le temps et l’obsolescence programmée de ce merveilleux grouillement végétal et animal dont on perçoit l’originelle présence autant que la fragilité : l’œuvre est ici non pas utile comme une collecte ou un recueil de données mais indispensable.

Les nervures de feuilles, les scories, les fibres, les pigments, les coquilles et squelettes, ces bouts de mémoire d’univers qui s’impriment dans la matière ou semblent nus dans le désert d’une trame polymorphe orchestrent un dialogue ; un dialogue secret dont nous sommes avides avec un monde silencieux et dispersé, inconnu, utopique. Pourtant, comme des morphèmes sur les parois des grottes préhistoriques, voilà que ces petits arrangements avec la forme font sens et signe, nous semblent familiers : un langage s’invente qui résonne tel une écriture de l’univers.

L’art prend ici la forme d’une archéobiologie du futur où explorations, gestes, matières, trésors perdus et retrouvés, action de l’eau, de l’air et de la presse fabriquent de drôles de parchemins à l’allure d’éternité.

L’entreprise est monastique (comme dit Kenneth White), consciente de son urgence et de son importance, de son ambition vertigineuse, mais elle ne peut alors que se fonder sur une profonde humilité. C’est ce qui la rend si précieuse, si sensible et sans aucun doute, unique.

YO  - Février 2016

 

The Art of Dominique Rousseau, Garden of the Universe

"Well-versed elders on the study of nature say the living is like a microcosm." Galien

 Topographical memories

Carefully, patiently, obstinatly, capturing the world's footprint, challenging time and the planned obsolescence of this wonderful bustle of animal and vegetal life for which we can sense both the primary presence and the fragility : the artwork here is not useful as is a collection or a data repository, but is nonetheless indispensable. Leaf veins, slags, fibres, pigments, shells and skeletons, these little bits of the universe's memory imprinting the matter or appearing naked in the desert of a polymorphic grid, initiate a dialogue we crave for; a secret dialogue with a silent, scattered, unknown, utopian world. However, just like morphemes on the walls of prehistoric caves, these assemblages of forms constitute signs that make sense and appear familiar: a language in the making that echoes as a writing of the universe. Art has shaped into an archeobiology of the future, where explorations, movements, matter, lost and found treasure, the actions of water, air and the printing press create wondrous parchements that reach for eternity. In the words of Kenneth White, the effort is monastic. Aware of its significance, urgency and dizzying ambition, it can however only rely on a deep sense of humility. This is what makes it so precious, conscious and, no doubt, unique.

YO

Voyage en apesanteur